Le film La Glace et le Ciel rend un sublime hommage au scientifique Claude Lorius

Le film La Glace et le Ciel rend un sublime hommage au scientifique Claude Lorius

La Glace et le ciel est le nouveau film documentaire de Luc Jacquet, le réalisateur de la Marche de l’empereur. Avec ce documentaire, il rend hommage au découvreur du réchauffement climatique, Claude Lorius.

Il est l’un des plus grands glaciologues du XXème siècle, il a prouvé, en 1987, que les rejets de CO2 dans l’atmosphère par l’activité humaine étaient responsables du réchauffement climatique. A l’occasion de la sortie du film, nous revenons avec lui sur son parcours.

Le film retrace son histoire et nous fait retourner avec lui sur les terres les plus hostiles de la planète, le Pôle Sud. Des images époustouflantes de cet horizon de blanc immaculé où le froid peut attendre -90° et le vent dépasser les 300 km/h. Le message du film est limpide, il est temps d’agir et de répondre au plus grand défi de l’homme : enrayer le réchauffement climatique.

L’Antarctique contient les archives climatiques du monde

« Je n’étais pas retourné en Antarctique depuis longtemps, car physiquement je n’étais pas en état, et puis, à 70 ans, j’avais un peu perdu la mémoire. Alors, le fait d’y retourner, de regarder les photos de cette époque, les textes que j’avais écris, cela m’a redonné vie ! », s’exclame Claude Lorius.

Le film combine les images d’archive avec des prises de vue récentes, lesquelles montrent un scientifique au pas hésitant qui marche une nouvelle fois sur ces terres du bout du monde.

L’épopée scientifique a commencé il y a 60 ans en Antarctique. Claude Lorius a 23 ans, il est étudiant en sciences physiques. Il embarque avec deux pontes de la science polaire, et va vivre pendant un an sur la base Charcot, à 300 km des cotes.

Tous trois s’installent dans un terrier de 24m2 où un poêle peine à maintenir un petit 8° à l’intérieur. Ils doivent lutter contre les éléments : la neige qui recouvre et enterre leur matériel, le vent qui détruit leur station météo.

Chaque homme a une mission, Roland Schlich s’intéresse aux champs magnétiques, Jacques Dubois étudie la pression atmosphérique, les vents et l’humidité de l’air, Claude Lorius, doit répondre à une question, pourquoi fait-il si froid ici ?

« J’ai passé une bonne année là-bas. Ensuite il fallu revenir et analyser les échantillons de glace prélevées et j’ai compris qu’on tenait quelque chose d’incroyable dans l’histoire scientifique. De l’aventure je me suis passionné pour la recherche, l’Antarctique contient les archives du climat et de l’atmosphère terrestre, un trésor qui n’existe nul par ailleurs.  »

Claude Lorius a eu une intuition formidable, dans les couches de glace accumulées au fil des siècles sur le continent Antarctique s’inscrit l’histoire du climat. La composition chimique de la neige change en fonction de la température à laquelle elle s’est formée.

En Antarctique la neige atteint entre 2km et 5km d’épaisseur. Claude Lorius précise : : « La terre n’a qu’une atmosphère, quand on fait quelque chose dans le monde cela peut atteindre l’ensemble de la planète » 

Si on prélève de la glace située 2 mètres sous nos pieds on trouve dans les cristaux de neige l’impact des essais thermonucléaires des années 50, si on descend à 13 mètres on observe des traces d’éruptions volcaniques qui ont eu lieu en 1810 et 1815 en Indonésie…

Il part ensuite pour la Terre Adélie dans le cadre d’un programme international. Un soir, l’équipe trinque à l’arrivée d’un scientifique Australien, et décident de prendre la glace forée pour faire office de glaçons.

Claude Lorius observe alors de fines bulles d’air contenues dans les glaçons qui remontent à la surface. Ces bulles ont capturé l’air du passé ! Des bulles qui révèlent le volume de CO2 ou la température de la terre à une date T.

La preuve que le réchauffement climatique est le fait de l’homme 

Pendant 20 ans, Claude Lorius va forer la glace de l’Antarctique pour comprendre. En 1987, il publie avec Jean Jouzel trois articles retentissants dans la revue scientifique Nature. Ils ont remonté 160 000 ans d’histoire du climat, ont prouvé que la conteneur en CO2 de l’atmosphère avait augmenté rapidement depuis le milieu du XIXe siècle, soit le début de l’ère industrielle.

La température, en corrélation, avait augmenté aussi, ils ont ainsi démontré que les deux sont irrémédiablement liés. Les activités humaines rejettent plus de CO2 que la terre ne peut en absorber. Le climat de la terre change à un rythme jamais vu.

Depuis, les causes du réchauffement climatique ne font plus aucun doute et des scientifiques continuent d’étudier l’Antarctique. Ils ont réussi à remonter 800 000 ans d’histoire climatique.

Claude Lorius est un optimiste, il est persuadé que l’homme a les ressources pour inverser le cours de choses et endiguer le réchauffement climatique. Par ses travaux, et ce projet, il entend poser sa pierre à l’édifice.

Il réalise l’ampleur de la tâche : « Les présidents veulent s’occuper du climat, c’est une satisfaction, on y est pas encore mais il y a enfin une prise de conscience globale. Il faut faire des choses maintenant mais on ne bouleverse pas le monde avec un clic sur Internet, cela ne va pas se faire sans douleur, sans changement de vie pour certain, en particulier pour les riches. »

Après l’ère de l’anthropocène, celle où l’homme est devenu le maître, où l’homme modifie à outrance son environnement, viendra peut-être un temps où l’homme deviendra plus respectueux de la terre. « Il faudra trouver un nom à cette ère, peut être le monde de la concorde, de la paix, des citoyens… il faut trouver mais surtout agir ! »

Source : Caroline Amiard / goodplanet.info

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