Une équipe à la recherche de la plus vieille glace du monde en Antarctique développe de nouveaux outils

Une équipe à la recherche de la plus vieille glace du monde en Antarctique développe de nouveaux outils

Pourquoi le rythme des glaciations s’est-il brusquement ralenti il y a environ un million d’années ?

Pour répondre à cette question et ainsi mieux anticiper l’évolution climatique future, le consortium BE-OI, coordonné par l’institut allemand Alfred Wegener et composé de chercheurs issus de 14 institutions, s’est mis en quête d’une glace vieille d’au moins 1.5 million d’années.

Financé à hauteur de 2.2 millions d’euros sur trois ans dans le cadre du programme européen H2020, ce projet vise à localiser, en Antarctique, un site permettant de remonter plus loin dans le temps que 800.000 ans, âge maximal de la glace extraite lors du forage EPICA. Les études commenceront dès cette année durant l’été austral, dans deux régions de l’Antarctique, à proximité du dôme Fuji et de la base Concordia.

Pourquoi y a-t-il eu un changement des cycles de glaciation il y a un million d’années?

Extraire une carotte de glace aussi ancienne permettrait d’élucider l’un des mystères de la paléoclimatologie. Il y a environ un million d'années, le climat de la Terre a subi un changement de rythme majeur. « À ce jour nous ne savons toujours pas pourquoi la périodicité des cycles glaciaire-interglaciaires a considérablement changé autour de 900.000 à 1.2 million d'années avant notre ère », précise Jérôme Chappellaz, directeur de recherche au CNRS.

Alors que les glaciations survenaient tous les 40.000 ans environ, leur fréquence est descendue à une tous les 100.000 ans, comme en témoignent les sédiments marins. Mais le déroulement et les causes de cette modification demeurent énigmatiques, et le resteront sauf si les scientifiques parviennent à disposer de glace datant de cette époque.

La glace « archive » l’environnement qui l’entoure

Grâce aux carottes de glace, les scientifiques peuvent obtenir une multitude d’informations sur le fonctionnement du système climatique terrestre, dont l’évolution des gaz à effet de serre. Seules ces archives glaciaires permettent de renseigner directement la composition de l’atmosphère par le passé et donc d’évaluer le rôle joué par les gaz à effet de serre lors de cette transition climatique majeure.

Pour y parvenir, le projet BE-OI inclut une batterie de méthodes originales qui visent à déterminer le site où dénicher cette glace si convoitée. Il fait aussi appel à des technologies d’accès rapide à la glace profonde, comme Subglacior, une sonde qui date la glace en temps réel, développée par plusieurs laboratoires associés au CNRS.

Un radar aéroporté pour étudier les couches internes du glacier

Deux régions potentiellement intéressantes seront explorées : le secteur du dôme Fuji et une zone appelée « Little Dome C » située à environ 40 kilomètres de Concordia. Dès l’été austral 2016/2017, les Allemands déploieront un radar aéroporté vers le Dôme Fuji, dans l’objectif de documenter les couches internes du glacier, caractériser le profil du socle rocheux, déterminer les propriétés physiques de la glace, et voir si des écoulements anormaux se sont produits en ayant mélangé les couches anciennes. 

La nouvelle sonde Subglacior : mesurer sans carottage

Du côté français, les premiers tests en Antarctique de la sonde Subglacior seront également réalisés durant la saison australe 2016/2017. Entièrement inédite, cette sonde doit permettre de mesurer au sein même du glacier, en continu et en temps réel, certains signaux géochimiques permettant d’évaluer l’âge de la glace et la bonne continuité stratigraphique au sein du glacier.

Atout indéniable de la sonde, ces informations s’obtiennent sans carottage. « Tout est nouveau dans cette sonde, depuis l’instrument laser embarqué jusqu’à la façon dont on pénètre dans le glacier », indique Jérôme Chappellaz, qui la testera en compagnie de huit membres du projet. Elle sera déployée la saison suivante près de Concordia sur le site considéré comme le plus prometteur par le consortium BE-OI (sur la base des données géophysiques obtenues cette année).

Source : meretmarine.com

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